mercredi 1 juin 2011

Les clichés sur les blondes sont -ils racistes ?

    Un extrait de "La psychologie des préjugés" de l'American Psychological Association; ce passage est particulièrement significatif à propos de  l'influence des préjugés sur leurs victimes, et dans le cas qui nous occupe, à propos des accusations publiques de stupidité et d’hyper sexualité portées contre les femmes blondes.
 
Les conséquences de l’utilisation de stéréotypes
Une fois activés, les stéréotypes peuvent fortement influencer les perceptions et comportements sociaux. Par exemple, des études sur l’amorçage ont démontré que lorsque des étudiants universitaires sont exposés à des mots et des images représentant des stéréotypes liés à la vieillesse, ils vont par la suite marcher plus lentement et accomplir une tâche de reconnaissance verbale plus lentement (Bargh, Chen, & Burrows, 1996; Kawakami, Young, & Dovidio, 2002). De même, des étudiants ayant subi une tâche d’amorçage avec des stéréotypes de «voyou de soccer» («soccer hooligan») vont répondre correctement à moins de questions de connaissance générale, alors que des étudiants ayant subi une tâche d’amorçage avec des stéréotypes de professeur vont démontrer un meilleur rendement (Dijksterhuis & van Knippenberg, 1998). Même si la raison de ses effets n’est toujours pas claire, il semble que lors de l’activation de représentations de stéréotypes comportementaux, le comportement en question devient aussi activé (Wheeler & Petty, 2001).
En plus des effets d’amorçage, les gens subissant des stéréotypes doivent faire face à un deuxième fardeau: la menace que leur comportement confirmera un stéréotype négatif. Claude Steele et ses collègues ont démontré que ce fardeau, connu sous le nom de «menace du stéréotype», peut créer de l’anxiété et gêner le rendement à une multitude de tâches (Steele, 1997). Par exemple, des étudiantes en mathématiques faisant face à un examen difficile vont montrer une baisse de rendement si elles sont informées que ce test révèle les différences de genre dans les habiletés mathématiques (Spencer, Steele, & Quinn, 1999). Une étude particulièrement intéressante dans cette même veine d’idées démontre que si des femmes asiatiques sont poussées à penser à leur ethnie, leur rendement en mathématiques s’améliore (ce qui congruent avec le stéréotype que les Asiatiques sont bons en mathématiques), mais lorsqu’on leur fait prendre conscience de leur genre, leur rendement en mathématiques s’affaiblit (Shih, Pittinsky, & Ambady, 1999). Une tendance semblable se produit chez les jeunes enfants: Lorsque des filles asiatiques prenaient conscience de leur ethnie (en coloriant l’image d’enfants asiatiques mangeant avec des baguettes), leur rendement en mathématiques s’améliore, mais si elles sont poussées à penser à leur genre (en coloriant l’image d’une fillette jouant avec une poupée), leur rendement en mathématiques devient plus faible (Ambady, Shih, Kim, & Pittinsky, 2001).


Pourquoi tant de haine ?

                        Les effets d'humiliation et d'inhibition ressentis par les victimes de préjugés racistes sont bien connus depuis de nombreuses années. C'est ainsi qu'une femme blonde, une enfant, une adolescente ou une mére blonde vont "encaisser" ces signaux négatifs, les intérioriser   puis adapter leur comportement à ces humiliations.  Mais ces victimes sont confrontées à une double peine : A ces humiliations publiques viennent s'ajouter ce que les spécialistes appellent "la menace du stéréotype", où elles vivent dans l'angoisse et la honte que le stéréotype soit réactivé de nouveau devant elles. Elles sont condamnées à se surveiller sans relâche  pour éviter de confirmer le stéréotype, car la moindre faiblesse renforcera  leurs persécuteurs et diminuera leur propre estime.  Cette épée de Damoclés produit de l'anxiété et une baisse de rendement dans l'activité, car ces "piqûres de rappel" peuvent intervenir à n'importe quel moment et/ou saboter n'importe quelle relation . Il y a là une souffrance invisible, niée et obsessionnelle par ses répétitions dans tous les médias . Cette omniprésence devient  apparemment institutionnelle, puisque tolérée par les pouvoirs publics et les censeurs des médias.
 
                        Il est courant d'entendre, lorsqu'une femme blonde se plaint de ces clichés racistes, un intervenant, généralement un homme, répondre : "Vous, les blondes, vous manquez vraiment d'humour, pour vous focaliser là-dessus". On est là, typiquement dans un processus de perversion car à l'expression d'une souffrance la réponse est une nouvelle insulte, avec une tentative de culpabilisation qui renforce le stéréotype raciste.La victime est acculée en définitive à une situation impossible; elle est condamnée soit à perdre sa dignité dans un silence imposé et destructeur, soit à perdre sa dignité en rejoignant la foule des moqueurs ( Fais preuve d'humour !) et participer à sa propre humiliation. Un choix impossible est ainsi ordonné à "la blonde", et tout commentaire sur l'absurdité de cette situation lui est interdit par ses persécuteurs. Et on sait qu'imposer à une victime ces choix paradoxaux est la voie royale pour la conduire vers la schizophrénie.
 
                        Il est temps que la pollution sociale que constitue ces "blagues blondes" et les clichés afférents cesse, et cela d'autant plus qu'ils visent une minuscule minorité sur cette petite planète (moins de 0.5 % de ses habitants) ; c'est là  une question de dignité humaine et de respect.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire